Avorter au Ghana
J'ai été virée d'un forum d'expats - y'en n'a pas 100 000, je vous laisse deviner lequel - pour diffamation, alors que je voulais simplement partager mon expérience, et donner à mes homologues féminins l'occasion de ne pas subir le même sort. Voilà que je me retrouve enceinte au Ghana. Dans ces pays de l'Afrique de l'Ouest, ce n'est pas un cliché de dire qu'il n'y a rien à bouffer. Et encore moins pour des occidentaux. Les oeufs, même vendus en Supermarchés sont pourris, le lait est périmé de plusieurs mois, les fruits et les légumes sont soit gâtés, soit inabordables, à moins de se restreindre à la mangue et à la pastèque. Je ne me voyais pas vivre une grossesse dans ces conditions, puisque je me nourrissais presque essentiellement que de riz et de pastèque - la viande... je préférais m'abstenir, ne sachant pas combien de temps elle avait séjourné sous le cagnard. Bon. J'ai décidé d'avorter. Le temps presse. Je fais quoi? je vais où? Mon copain, lui, avait le privilège d'être membre de WARA - West African Rescue Association -. Cette structure n'a rien d'une association. Business is business; je n'étais pas membre et ne pouvais le devenir, sans doute pas assez "in", ils m'ont envoyée bouler quand je leur ai demandé s'il était possible de mettre un terme à ma grossesse au sein de leur "clinique". Je suis retournée sur le net, ai visité les pages des ambassades, des forums, rien ne m'indiquait où me rendre. J'ai appelé quelques hôpitaux dont le Medifem, j'ai eu le droit à des insultes. Eh oui, au Ghana, c'est péché d'avorter. Finalement, j'ai trouvé une ONG qui prodiguait ce dont j'avais besoin. Très spartiate, l'ONG. Je n'ai pas eu le choix, j'ai pris les medocs qu'on me tendait. L'avortement s'est très mal passé. J'ai perdu des litrons de sang, j'ai rappelé ces cons de WARA, j'ai eu la même réponse "vous n'êtes pas membre, on ne peut pas vous aider". Ils ne m'ont donné aucune adresse, alors que j'étais en pleurs. Aucune empathie, Hypocrate a dû se retourner dans sa tombe. Enfin, je ne sais plus par quel biais, je tombe sur l'adresse de la German Clinic. La gynéco, une allemande, s'est affolée en voyant mon état. N'a pas compris pourquoi WARA ne m'avait pas envoyée chez elle "je ne sais pas ce qu'ils ont contre moi, c'est pas la première fois que ça arrive". J'en ai eu encore pour un mois de traitement, j'ai évité le curetage de justesse. Le tout a duré 2 mois, avec infection. Grâce à la solidarité de WARA. Si jamais ça vous arrive, contactez Dr. Luitgaard, c'est une gynéco brute de décoffrage, mais c'est une professionnelle de la médecine dont elle respecte les codes, pas une commerçante.
